Chauffage : la Cour de Cassation (Chambre civile 3, 11 octobre 2018, 17-21.286, ), facilite la responsabilité du bailleur

par | Nov 1, 2018 | Bail commercial, Bail habitation, Blog juridique, Nuisances | 0 commentaires

En se fondant sur l’obligation de jouissance paisible de l’article 1719 du code civil, la troisième chambre civile (Chambre civile 3, 11 octobre 2018, 17-21.286), facilite depuis peu l’indemnisation des locataires dont le chauffage est défectueux.

Quelques explications.

 

La troisième chambre civile de la Cour de Cassation vient de rendre un arrêt le 11 octobre 2018  (Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 11 octobre 2018, 17-21.286, Inédit) dans la lignée du développement tentaculaire des obligations à la charge du bailleur.

Selon l’article 1719 du code civil, le bailleur est obligé d’assurer au locataire la jouissance paisible de la chose louée. Il en résulte qu’il peut être condamné à indemniser le locataire, en cas de coupures de chauffage. La solution est relativement classique.

Ce qui est plus original, c’est qu’en principe, d’après les règles de preuves, c’est au demandeur, c’est-à-dire au locataire d’établir, par une expertise judiciaire, après un constat d’huissier, la cause des coupures. Il est tout à fait possible en effet que ces coupures soient la conséquence de son propre défaut d’entretien par exemple.

Dans cette affaire, ce qui retient l’attention c’est que,

  • D’une part, on ne connaissait pas la cause des coupures et ces dites coupures étaient ponctuelles.
  • D’autre part, les dysfonctionnements étaient ponctuels (quelques jours)

 

Pourtant, la Cour de cassation CASSE et ANNULE l’arrêt de la Cour d’Appel de VERSAILLES qui avait retenu « qu’aucune précision n’est fournie quant aux causes de ces coupures dont rien n’indique qu’elles soient imputables au bailleur et que celui-ci ne peut être tenu des dysfonctionnements ponctuels des appareils dont il doit assurer l’entretien »

Ce n’est donc plus au locataire de prouver que le chauffage ne fonctionne pas ou mal du fait du bailleur, mais au bailleur de démontrer, si tel est le cas, que le chauffage ne fonctionne pas  en raison de l’entretien défectueux du locataire.

Si la cause des coupures est inconnue, le preneur n’est toutefois pas dispensé de la preuve de l’existence du dysfonctionnement et de son préjudice, soit par Huissier, soit par un écrit du bailleur ou de son gestionnaire qui reconnaît noir sur blanc l’existence du dysfonctionnement, soit encore par une attestation du plombier ou un rapport d’expertise d’assurance encore.

 

Comment est évalué le préjudice de chauffage ?

Il est soumis à l’appréciation souveraine des juges du fond et est donc assez aléatoire.

Voici quelques exemples de jurisprudence :

 

Cour d’appel, PARIS, Chambre 6, 7 Juillet 1980 : Numéro JurisData : 1980-098547

4 radiateurs en état de marche sur 13, température intérieure de 17 degrés, trouble du a une installation vétuste et mal réglée, évaluation du préjudice a 30 % du loyer pendant 6 mois de chaque année, responsabilité du bailleur et du syndicat de la copropriété,

 

Cour d’appel Paris, Pôle 4, chambre 4, 27 Septembre 2011

 « Considérant que le dysfonctionnement de l’installation de chauffage des lieux loués a causé à Melle D. et à Melle L. un préjudice de jouissance d’une durée de deux mois d’entre le 15 octobre et le 18 décembre 2007 qui sera réparé par l’allocation de dommages-intérêts à la charge de M. DUTREVE et à hauteur de la somme de 700 € eu égard à cette durée et au montant du loyer contractuel (de l’ordre de 800 €) ;

 

Dans de nombreux cas, le préjudice causé par le dysfonctionnement du chauffage est rejeté ou mal indemnisé, essentiellement, pour des questions de preuve.

Portée de la décision :

Autre intérêt de la décision de la troisième chambre civile de la Cour de Cassation du 11 octobre 2018 : le fondement juridique est l’article 1719 du code civil. Il ne s’agit donc pas d’une décision dont la portée est restreinte aux baux d’habitation soumis à la loi du 6 juillet 1989.

Le raisonnement peut trouver application pour les baux professionnels et les baux commerciaux, même si le contrat de location peut contenir des stipulations compliquant la mise en cause du bailleur.

La portée est toutefois limitée dans la mesure où cet arrêt n’a pas été publié au bulletin de la Cour de Cassation.

 

 

Et alors, en pratique ?

Quoiqu’il en soit, le bailleur (ou son administrateur de biens) doit donc désormais faire preuve d’une particulière vigilance sur ces questions et missionner rapidement un artisan qualifié et compétent pour réparer l’installation défectueuse, dans les meilleurs délais, sous peine de s’exposer à des contestations.

Sinon, certains locataires bien informés n’hésiteront pas à demander rapidement une indemnisation.

Un dernier mot sur la décision : l’enjeu du litige étant  de l’ordre de 500 € sur cette question : pas sûr que les parties poursuivent leur joute judiciaire devant la Cour d’Appel de VERSAILLES de renvoi, autrement composée.

 

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